Le traité transatlantique sous le feu des critiques

Reprise des négociations transatlantiques à Arlington en Virginie en vue d'établir un vaste accord de libre-échange. C'est la 5ème série de négociations entre les Etats-Unis et l'Union européenne.

La cinquième série de négociations sur le traité de libre-échange entre l’Union européenne et les Etats-Unis s’ouvre ce lundi 19 mai à Arlington en Virginie. Il vise à éliminer les barrières douanières entre les deux continents et à réduire les obstacles aux échanges de biens et de services.

Le moins que l’on puisse dire c’est que ce partenariat transatlantique suscite de fortes réserves et de l’hostilité à une semaine des élections européennes. Ses détracteurs craignent qu'il n'affaiblisse les normes sanitaires, environnementales et sociales européennes. Car les droits des douanes seront supprimés et surtout les normes réglementaires qui protègent les consommateurs devront être harmonisées avec le risque que cette harmonisation se fasse par le bas, c'est-à-dire que l'Europe s'aligne sur les normes américaines.

Ce que craignent les opposants au traité, c’est donc de voir dans nos magasins du bœuf aux hormones ou de la volaille nettoyée au chlore. Ce que réfute Henri Weber, eurodéputé socialiste français et membre de la commission du Commerce international au Parlement européen. Pour lui, il est absolument hors de question que les Européens s’alignent sur les normes sanitaires, environnementales et sociales américaines. « Pour que ce traité soit ratifié, l’accord final doit être approuvé à l’unanimité par les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne, explique-t-il. Il doit être ensuite approuvé par la majorité absolue du Parlement européen, et en troisième lieu il doit être approuvé par chaque Parlement national. »

Opacité

Les détracteurs de l’accord, les mouvements écologistes, altermondialistes et d'extrême gauche en Europe, dénoncent aussi l’opacité de ces négociations. Même le ministre de l'Economie, Arnaud Montebourg, a indiqué la semaine dernière que les Etats membres n'ont pas les informations suffisantes sur le détail des négociations. Ils souhaitent que la France soit associée pour préserver les intérêts nationaux. « C'est un dossier qui est directement géré par les commissaires européens qui négocient en notre nom, ce qui est un problème », a souligné Arnaud Montebourg. Mais la Commission européenne estime que pour réussir des négociations commerciales, il faut respecter un certain degré de confidentialité; sinon cela reviendrait à montrer son jeu à son adversaire durant une partie de cartes.

Informer les citoyens de l’avancée des négociations ne semble donc pas une priorité. Si l’opacité est totale pour les citoyens, elle l’est moins pour les grands groupes privés, ironise Dominique Plihon, professeur d’économie à l’université Paris XIII : « Les séries de négociations sont préparées par des contacts extrêmement étroits avec les lobbies. On s’aperçoit que sur une centaine de réunions préparatoires, il y en a eu 80 % qui ont été faites avec les lobbies et seulement 10 % avec les organisations de la société civile. Donc il y a une relation étroite entre la Commission et le monde des entreprises. »

Autre critique du projet d'accord, le renvoi à des tribunaux extérieurs aux États, qui auraient un rôle déterminant à jouer en cas de recours, notamment de grandes entreprises ou multinationales, pourrait avoir des conséquences graves. En d’autres termes, il s’agit de la création d'un futur organe de résolution des conflits qui pourrait donner beaucoup d'influence aux multinationales sur les décisions des gouvernements.

Avantages économiques

Pour les partisans de ce traité transatlantique, l’accord de libre-échange pourrait rapporter jusqu'à un demi-point de croissance à l'Europe, et permettre la création de milliers d'emplois. Il pourrait, selon Bruxelles et Washington, doper l'économie européenne de 120 milliards d'euros par an et l'économie américaine de 95 milliards. Cet accord permettra aux entreprises européennes d’avoir un meilleur accès à l’énorme marché public des Etats-Unis car l’équilibre n’y est pas : si les marchés publics en Europe sont ouverts à 85 % aux soumissionnaires américains, les marchés publics américains sont ouverts à 35 % seulement à l'Europe.