ONU: le «marteau-piqueur» Guterres au défi des Nations unies

Le Portugais António Guterres va prendre les rênes de l’Onu en janvier prochain. Il est intronisé officiellement ce lundi 12 décembre à New York où il va prêter serment et présenter son programme. Les Portugais ne dissimulent pas leur fierté. 

 

de notre correspondant - DAVID DACHRIS HANGI

Le choix de Guterres pour le poste de secrétaire général de l’ONU rend heureux les Portugais. Ils l’admirent pour un parcours presque sans tache, et pour s’être s’effacé quand ce fut nécessaire. Au Portugal, António Guterres est un mélange assez rare de socialisme et de catholicisme, imprégné de Marx et d’Opus dei, dans les mêmes proportions. Une sorte d’ovni politique qui met tout le monde d’accord, à droite comme à gauche. « C’est le meilleur d’entre nous », a d’ailleurs déclaré le président de la République Marcelo Rebelo de Sousa à propos de Guterres.

S’il fait l’unanimité, il ne bénéficie pas pour autant d’une grande couverture médiatique, l’homme étant plutôt discret. Un iconoclaste : brillant, érudit, polyglotte, détestant la morue… un Portugais atypique. A Donas, son village d’origine, où il passait ses vacances dans son enfance, il était qualifié d’enfant au cœur d’or. A 67 ans, l’homme reste auréolé de son humanité.

Un parcours politique réussi

António Guterres est un « chrétien de gauche » comme on le définit en France. Alors que sa jeunesse a été marquée par l’action sociale, au sein du mouvement de la jeunesse catholique, António Guterres se consacre à de -brillantes- études d’ingénieur en électricité, et se tient à l’écart des manifestations étudiantes, alors que la dictature vacille.

Curieusement, sans que l’on sache trop comment, il décide en 1973 d’adhérer au tout jeune parti socialiste. Un an plus tard, au lendemain de la révolution démocratique des Œillets, celui qui arbore une moustache en hommage à Salvador Allende, entame une brillante carrière politique. Elle ne s’arrêtera qu’au début du second mandat de Premier ministre de Guterres en 2001. Les socialistes sont désavoués aux élections municipales, et le chef du gouvernement préfère démissionner dans l’intérêt supérieur du pays. Probablement plus affecté par le décès de sa femme qu’il n’y paraît, António Guterres s’éloigne alors de la politique et de son pays. Il préfèrera visiter les camps de réfugiés et tenter de résoudre leurs problèmes en tant que haut commissaire aux réfugiés de l’ONU, de 2005 à 20015.

Un vrai stratège en matière de diplomatie

António Guterres a la stature de l’homme politique au vrai sens du terme. C’est un habile négociateur doué d’un sens aigu de la communication et de la rhétorique. Un journaliste l’a même qualifié de « marteau piqueur », tant il maîtrise à la perfection l’art du discours, et possède de la force de conviction.

L’un de ses exploits de stratège, sur la crise du Timor oriental, est souvent cité. Il a fait face à Suharto l’Indonésien, qui voulait garder le territoire, et à Clinton l’Américain, qu’il a menacé de perdre un allié précieux en Europe si les Etats-Unis ne soutenaient pas la cause timoraise.

Sous ses airs débonnaires, l’homme cache un fin stratège passionné d’histoire, très cultivé et déterminé. Le « marteau-piqueur » portugais semble à la hauteur des rochers diplomatiques qui l’attendent.


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